Coup d’œil dans le camp des e-fumeurs
Près de 2 millions de Français utilisent régulièrement la cigarette électronique. Ni fumeurs, ni non-fumeurs, ce sont des vapoteurs. Avec cet objet au bout des lèvres, ils inspirent de la vapeur qu’ils recrachent en épais nuages blancs. La ressemblance avec le geste du vrai fumeur est frappante. Vapoter consiste à simuler l’acte de consommer du véritable tabac. Pour quoi faire exactement ? Devenir ex-fumeur ?
Une bouffée d’e-cigarette, ça se passe comme ça
Les mèches de l’atomiseur (petit réservoir transparent de la cigarette électronique) sont imbibées d’un e-liquide aromatisé contenant un dosage variable de nicotine (de 0 à 20 mg/ml en Europe). Une pression sur le bouton de chauffe et le mélange à base de propylène glycol se transforme en aérosol. Une inspiration, et la bouffée voyage dans les poumons du fumeur avant d’être expulsée à l’air libre. Un cycle classique et bien connu des fumeurs. Tirer une « e-taffe » se résume à cela.
Des dangers moindres qu’avec la cigarette
En dépit de cette ressemblance avec la bouffée de tabac, la majorité des tabacologues s’accordent à dire que les effets sont différents. Idem pour les risques. La vapoteuse est moins dangereuse que la cigarette, en partie parce qu’elle ne contient pas de produits de combustion et qu’elle ne génère pas de monoxyde de carbone ni de particules. Les cancérogènes y sont également en quantité très limitée. Le professeur Bertrand Dautzenberg, praticien hospitalier dans le service de pneumologie de la Pitié-Salpêtrière, professeur de pneumologie et président de l’Office français de prévention du tabagisme exprime son avis en ces termes : « Il est évident que même si la cigarette électronique est un peu irritante pour les bronches, elle ne sera jamais aussi nocive que le tabac ».
Un moyen de sevrage idéal ?
En réduisant progressivement les dosages de nicotine, le fumeur peut se servir de la cigarette électronique comme moyen de sevrage. Toutefois, ces observations sont à prendre avec des pincettes. Le professeur Dautzenberg la considère effectivement comme une aide intéressante pour réduire la dépendance au tabac, mais il souligne que ce produit ne bénéficie pas des mêmes évaluations scientifiques que les autres substituts nicotiniques. D’où l’importance de relativiser ses supposés bienfaits. Il est encore trop tôt, et le monde de la recherche n’a pas encore suffisamment de recul sur le sujet pour tirer de solides conclusions. L’absence totale d’innocuité n’est pas prouvée. Un moyen de sevrage idéal doit comporter une part infime de risques. L’e-cigarette ne peut actuellement revendiquer ce statut.
Le vapoteur est un ex-fumeur de tabac qui fume toujours… mais pas vraiment !
L’e-cigarette brouille véritablement les pistes quand il s’agit de définir l’acte du vapotage. Le vapoteur n’est ni un fumeur, ni un non-fumeur. À la rigueur, un ex-fumeur de cigarettes. Il cherche à la fois à sentir un effet physique, ainsi qu’à entretenir des rituels sociaux (ne pas s’exiler des groupes de fumeurs) et comportementaux (la gestuelle). En somme, le vapotage consiste à remplacer une addiction par une autre. Ce que Bertrand Dautzenberg, lui-même ancien fumeur, ne dément pas : « C’est un produit toxique et addictif, mais 100 à 1000 fois moins dangereux que le tabac ».
Dans l’espoir que l’addiction au tabac recule définitivement, au point d’être un jour éradiqué, le professeur, militant de l’alternative vapotage, décrit les effets de la cigarette électronique comme suit : « Fumer, c’est un peu comme prendre l’autoroute à contresens. Vapoter, c’est rouler à 140 km/h au lieu de 130 km/h ».
Faut-il pour autant se laisser séduire par la vitesse ?